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aux conditions qu’on voulait lui imposer, et, après avoir fait les démarches convenables, il renonça pour toujours aux droits que la paternité lui donnait sur le journal qu’il avait créé.

Chapelain, auquel Balzac reprochait son humeur circonspectissime, et qui devait se montrer d’autant plus réservé envers les puissances qu’il était, comme on sait, le mieux renté de tous les beaux esprits, écrit à ce sujet, dans une lettre du 23 avril 1665 :


Les plaintes de Rome sur la liberté de notre Journal des Savants en ont fait suspendre la continuation, et il est à craindre qu’une aussi utile institution que celle-là n’échoue entièrement, depuis que M. de Sallo, qui en était l’âme, en a plutôt voulu abandonner le soin que de se soumettre au syndicat auquel les puissances voulaient qu’il s’assujettît. On croit néanmoins que quelqu’un relèvera cette entreprise, qui ne laissera pas d’être profitable, encore qu’elle ne soit pas menée avec la noblesse et le style du passé. Les Anglais, à notre imitation, en ont commencé un en leur langue. Ils sont doctes, curieux et libres, et l’on n’en doit guères rien attendre que de bon. Outre que, n’ayant pas l’obligation de garder les mêmes mesures que nous, il y a sujet d’espérer qu’il sera plus durable et non moins hardi que le nôtre.


Cependant Colbert comprenait trop ce qu’un ouvrage de la nature du Journal des Savants répandait d’émulation, et combien il pouvait être utile au progrès des lettres, pour souffrir que le projet en fût à jamais abandonné. Mais il s’agissait — et la chose n’était pas aisée — de trouver un homme qui, moins