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gédie d’Alceste ; parce qu’en un mot cette préface eût été un exellent article du Dictionnaire. En rendant compte de la réception de Boileau à l’Académie, il trouve que « M. Boileau est d’un mérite si distingué qu’il eût été difficile à Messieurs de l’Académie de remplir aussi avantageusement qu’ils ont fait la place de M. Bezons. »

On le voit, Bayle est un véritable républicain en littérature. Cet idéal de tolérance universelle, d’anarchie paisible et en quelque sorte harmonieuse, dans un État divisé en cinq religions comme dans une cité partagée en diverses classes d’artisans, cette belle page de son Commentaire philosophique, il la réalise dans sa république des livres, et, quoiqu’il soit plus aisé de faire s’entre-supporter mutuellement les livres que les hommes, c’est une belle gloire pour lui, comme critique, d’en avoir su tant concilier et tant goûter.

« Je ne faisais point de critique, dit-il lui-même plus tard, et je m’étais mis sur un pied d’honnêteté ; ainsi, je ne voyais dans les livres que ce qui pouvait les faire valoir ; leurs défauts m’échappaient. » On lui reprocha même d’abord d’être trop prodigue de louanges ; mais il s’en était bientôt corrigé, et d’ailleurs ses respects dans l’expression envers les auteurs ne lui dérobèrent jamais le fond ; ses éloges même ont un ton de modération qui laisse place à plus d’un trait narquois jeté en passant :