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n’y en ayant point, se pourvoir ailleurs. Ce qui fera discerner plus facilement les fainéants et gens sans adveu, pour en faire la punition qu’il appartiendra.


Renaudot va ensuite au devant des objections que son projet ne saurait manquer de rencontrer, quelque évidente qu’en soit l’utilité, et les réfute péremptoirement. Après tout, continue-t-il,


Ce qui doit fermer la bouche à cette opposition et à toutes les autres, c’est qu’estant permis à un chacun de s’en servir, si bon luy semble, ou ne s’en servir point, on n’y sauroit trouver de grief ou sujet de plainte, autrement il faudroit démentir la maxime Qu’à celui qui le veut, on ne fait point de tort.

Mais pour ce que ce n’est pas assez de faire le bien, il le faut faire dans l’ordre, j’ay creu (mon lecteur) vous devoir la déduction des moyens desquels Dieu s’est servi pour cet establissement, d’autant plus innocents qu’au lieu de m’estre ingéré, j’ay receu l’honneur d’estre mandé exprès par Sa Majesté du lieu de ma demeure, éloigné de cent lieuës, dès son heureux advènement à la couronne, pour contribuer ce peu que j’avoye d’industrie au règlement des pauvres de son royaume[1]. Se faut-il esbahir si le succez respond tellement aux desseins de nostre invincible

  1. C’est en 1612 que Renaudot fut mandé à Paris par le Roi, ou mieux, par Richelieu ; il y avait six ans, à cette époque, qu’il avait « reçu le bonnet à la fameuse Université de Montpellier. » À Guy Patin, « ce faquin venu d’un misérable paysan du village de Hodan, près de Beauvais », qui lui reprochait d’avoir été « élevé de la fange et de la poussière » par le Cardinal, il répondait, dans un factum que nous avons déjà cité (Response à l’Examen, etc. V. tome i, page 468), que ses ennemis, en le tirant si souvent de la fange, lui faisaient plus d’honneur qu’à un Patin, qui y était toujours. « Mais leur ignorance, ajoute-t-il, m’oblige à leur repartir qu’ils sont aussi mal informés des commodités dudit sieur Renaudot comme de tout le reste. De quoi le greffe de la Cour peut faire foi, par l’arrêt qu’il obtint l’an 1618 contre ses curateurs, qui portait condamnation contre eux de plus de vingt mille livres pour ses meubles paternels et maternels, sans y comprendre ses héritages, qui ne se montaient à guères moins. Voilà cette fange et cette poussière qu’il laissa dans Loudun, sa ville natale, lorsqu’il fut appelé en celle-ci, ou il en est venu plusieurs, à présent beaucoup mieux accommodés que lui, qui n’avaient pas, en y arrivant, tant de biens de leur patrimoine. »