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Page:Hawthorne - Contes étranges.djvu/169

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LA COMBE DES TROIS COLLINES

effort pour parler ; d’où je viens, peu importe, mais j’ai laissé derrière moi ceux auxquels est lié mon destin, et dont je suis pourtant à jamais séparée. Mon cœur est oppressé par un poids affreux, et je suis venue pour m’enquérir de leur sort.

— Qui pourrait en ce lieu désert te donner des nouvelles de ce qui se passe à l’autre extrémité de la terre ? s’écria la vieille en la regardant fixement ; ce ne sont pas des lèvres humaines qui peuvent répondre à ton désir ; cependant, si tu es courageuse, avant que la lumière ait abandonné la crête des collines, tes vœux seront exaucés.

— Dussé-je mourir, je vous obéirai, dit la jeune étrangère avec l’accent du désespoir.

La vieille s’assit alors sur le tronc dépouillé du vieux chêne et, rejetant en arrière son capuchon, laissa flotter au vent les mèches grises et rares de ses cheveux ; puis elle engagea sa compagne à s’approcher d’elle.

— Agenouille-toi, dit-elle, et appuie ton front sur mes genoux.

La jeune femme hésitait, mais, entraînée par une dévorante curiosité, elle obéit, et en s’agenouillant laissant pendre l’extrémité de sa robe dans l’eau stagnante de la mare. Elle appuya son front brûlant sur les genoux de la vieille, et celle-ci la recouvrant d’un pan de son manteau, lui cacha la lumière du jour. Elle entendit alors le murmure d’une étrange invocation et, saisie de frayeur, elle voulut se lever.

— Laissez-moi fuir, dit-elle, fuir et me cacher à leurs yeux.

Mais une pensée terrible la courba de nouveau et, plus pâle qu’une morte, elle se tut.