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mer, d’où il ne se serait pas donné la peine de remonter pour répondre aux questions d’un étranger. Quatre-vingt-dix-neuf personnes sur cent auraient eu la tête bouleversée à la première de ces horribles métamorphoses, et auraient pris leurs jambes à leur cou sans hésiter : car une des difficultés les plus grandes de ce monde, c’est de distinguer les dangers réels des dangers imaginaires.

Comme Hercule serrait toujours avec une ténacité invincible, et ne faisait qu’étreindre le monstre plus vigoureusement à mesure qu’il changeait d’aspect, en lui infligeant des tortures de plus en plus douloureuses, il le vit enfin reparaître sous sa forme naturelle. Le voilà donc reprenant ses nageoires, ses écailles, ses pieds palmés, et sa barbe touffue d’herbes marines.

« Que me veux-tu ? s’écria-t-il aussitôt qu’il eut repris haleine ; car c’est une chose assez fatigante que de passer par de si nombreuses transformations. Pourquoi me serres-tu si fort ? Lâche-moi tout de suite, ou je te prendrai pour une personne extrêmement mal élevée.

— Sache donc que mon nom est Hercule ! répliqua le génie de la force en faisant retentir le rivage de sa voix formidable ; et songe que tu ne sortiras de ces mains qui te tenaillent qu’après m’avoir dit quel est le chemin le plus court pour aller au jardin des Hespérides ! »