Page:Helvétius - Œuvres complètes d’Helvétius, tome 2.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

enchanteur qui change aux yeux de toutes les créatures la forme de tous les objets. Ce mouton paisible qui pâture dans nos plaines n’est-il pas un objet d’épouvante et d’horreur pour ces insectes imperceptibles qui vivent dans l’épaisseur de la pampe des herbes ? « Fuyons, disent-ils, cet animal vorace et cruel, ce monstre dont la gueule engloutit à la fois et nous et nos cités. Que ne prend-il exemple sur le lion et le tigre ? Ces animaux bienfaisants ne détruisent point nos habitations, ils ne se repaissent point de notre sang ; justes vengeurs du crime, ils punissent sur le mouton les cruautés que le mouton exerce sur nous. » C’est ainsi que des intérêts différents métamorphosent les objets : le lion est à nos yeux l’animal cruel ; à ceux de l’insecte c’est le mouton. Aussi peut-on appliquer à