Page:Hennique-Huysmans - Pierrot sceptique, 1881.djvu/20

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tas d’or dans mon armoire. Approchez, mon ami, approchez, la vue n’en coûte rien.

Dix fois le tailleur salue Pierrot, dix fois il s’incline jusques à terre et trouve sa platitude à peine suffisante. Le maître de la maison entr’ouvre l’armoire ; des monceaux de pièces de vingt francs fulgurent.

Le tailleur éperdu sanglote dans les bras de Pierrot.

— Tout doux, lui fait Pierrot, vos larmes salissent mon habit… Portez cette chaise à l’autre bout de la chambre… secouez ce tapis… ouvrez la porte de ce placard, plus large… plus large encore… c’est bien.

Et vlan ! d’un formidable coup de pied au cul, il le jette dans le placard et referme la porte sur lui.



Scène DEUXIÈME

PIERROT (seul)

Puisse le ciel traiter ainsi tous ses créanciers !

Sur ces entrefaites, petit à petit, la voix des cloches de l’église s’affaiblit. Leur babil s’envole plus atténué chaque fois, puis s’alanguit et meurt en l’imperceptible soupir d’un enfant qui dort.

Ne serait-il pas temps d’achever ma toilette ? pense Pierrot. Oh ! comme ma femme, dans son cercueil, doit s’ennuyer !… Elle était si joyeuse à table ! … si polissonne !… (Il montre le lit.)