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Cependant, ce fut avec un soupir de soulagement que le vieux notaire vit revenir Jock après l’examen que celui-ci avait voulu faire. Il se fit conduire à la gare et s’installa à son aise dans le train pour le long trajet qui restait à parcourir.

« Nous n’arriverons que tard ce soir, dit-il à son jeune compagnon ; aussi ferez-vous bien de rester tranquille, de lire ou de dormir un peu, sans quoi, vous n’en pourrez plus en débarquant à Gray-Tors. »

Malgré ces précautions, quand ils furent à destination le petit garçon était très fatigué.

Une voiture les attendait ; M. Harrison y monta le premier et, regardant l’enfant à la lueur des lanternes de la voiture, il lui dit avec désappointement :

« M. Grimshaw aurait bien dû vous laisser chez moi pendant cette première nuit. C’eût été préférable, car votre visage et vos vêtements portent les traces de la route. Cependant, puisque la voiture est là, nous devons aller jusqu’à Gray-Tors. »

Les plaintes de son ami n’émotionnèrent pas Jock ; il était occupé à deviner les sites qui se déroulaient devant lui. Les pentes rapides qui se succédaient lui révélaient des collines et des vallons ; des masses sombres revêtues, au milieu des ténèbres, de formes bizarres, donnaient des frissons à l’enfant, qui, pour se rassurer, se rapprochait de son compagnon.

Bientôt la voiture s’arrêta devant une maison carrée, dont l’aspect n’avait rien d’attrayant. Tout était triste ; pas une lumière aux fenêtres. La grande porte s’ouvrit brusquement et un sommelier à cheveux blancs parut sur le seuil.

« Nous guettions votre arrivée, dit-il, au moment où M. Harrison s’avançait dans le vestibule, suivi de près par l’enfant et le chien ; M. Grimshaw demande que vous alliez immédiatement à la bibliothèque avec ce jeune homme. Mais, il ne m’a pas parlé de chien, ajouta-t-il soudain, en apercevant Tramp.

— Très bien. Je vais rejoindre votre maître, et je me charge du chien, répondit M. Harrison.

« Jock, ajouta-t-il, vous ferez mieux d’attendre ici. »

Il s’éloigna à la suite du sommelier.

Dans un grand fauteuil, au coin du feu, était assis un vieux monsieur qui, au bruit de la porte, se retourna et salua avec un mouvement d’impatience.

« Pourquoi me faire attendre ainsi ? s’écria-t-il. Et où est l’enfant ? M’avez-vous amené le fils de Dick Pole ?

— Oui, oui, je l’ai amené, répliqua doucement M. Harrison. Mais j’ai eu plus de mal à persuader Mme Pole de me le confier que vous ne l’aviez cru.

— Quelle bizarre créature ! J’espère que Jock ne lui ressemble pas, sans quoi, il eût mieux valu le laisser chez lui. A-t-il quelque ressemblance avec sa mère ?

— Non, je ne lui en vois aucune, pas plus qu’avec son père d’ailleurs. À vrai dire, il n’est pas, à première vue, ce qu’on appelle un en-