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rois et les grands, qui voyaient, dans les prébendes que la guerre avait épargnées, de riches dotations pour leurs serviteurs dévoués et les cadets de famille, de temporaire, la commende devint perpétuelle, et le mal fit de tels progrès que Paul II, qui occupa la chaire de Saint-Pierre de 1464 à 1471, répondit au cardinal de Porto, qui le priait de l’abolir : « Comment faire ? La chose n’est pas possible[1]. »

Rien, cependant, n’était plus contraire aux canons de l’Église d’après lesquels nul ne pouvait être pourvu d’un bénéfice s’il ne réunissait deux conditions essentielles : la qualité personnelle et la résidence. En conséquence, nul ne pouvait obtenir un bénéfice régulier s’il n’était lui-même régulier et, en outre, s’il ne pouvait résider dans ce bénéfice. Cette seconde condition était surtout exigée pour les bénéfices emportant charge d’âmes, et elle excluait la réunion de plusieurs bénéfices sur une même tête. Mais, dirons-nous avec Léon Ménabréa, il n’est point de vérité sainte et éclatante que la logique sillogistique, année de ses distinctions aiguës, ne puisse ternir et rendre douteuse. On imagina de distinguer le titre d’avec l’émolument et d’enseigner que les régies sacrées des conciles concernaient exclusivement le titre et que le démon pouvait faire son profit du reste[2]. On pourvut in commendam le séculier, du bénéfice régulier, qu’il ne pouvait occuper in titulum

    1378, l’année même de son élection à Rome. Son successeur, Boniface IX, la confirma en montant sur le Saint-Siège (1389). Mais Calixte III, é1u sans conteste et reconnu chef universel de toute la chrétienté, à la mort de Nicolas V, en 1455, la défendit. Pourquoi son successeur, Pie II (1458-1464) ne l’imita-t-il pas ? Au dire de Papyre Masson, en moins de cinq ans, il conféra plus de cinq cents monastères en commende. (Levret, Traité de l’abus, t. I, p. 188.)

  1. Tamburini, De jure Abbatum, t. IV.
  2. Abbaye d’Aulps, Mém. de l’Acad sav., t. XI., p. 256.