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bert et assiège Montmélian. Les liens de parenté qui unissaient le régent au dauphin cèdent devant la recommandation d’Amédée III de veiller à l’intégrité de ses États. Quelques troupes fidèles sont réunies en toute hâte : le jeune comte quitte sa retraite d’Hautecombe, revêt le costume de guerrier, marche contre son turbulent voisin et le met en déroute au même lieu, dit Guichenon, où son père avait vaincu celui du Dauphin[1].

La sollicitude de l’évêque de Lausanne se reporta souvent sur son ancienne abbaye, où Humbert résidait fréquemment. Ce prince, sous l’influence des conseils de son ancien tuteur, du souvenir de son père mort à la croisade, sous l’impulsion de ses inclinations personnelles, suivait souvent, dans les cloîtres d’Hautecombe ou de l’abbaye d’Aulps, les longs offices des religieux, pratiquait leurs austérités et laissait aller son âme aux douces contemplations de la vie mystique. Cette tendance était un des caractères saillants de cette époque. Nous avons vu le père et le fils de Clermont d’Hauterive se présenter avec seize autres chevaliers au couvent de Bonnevaux. En 1078, Guy de Mâcon avec ses fils et trente chevaliers se faisaient moines à Cluny et leurs épouses prenaient le voile à Marigny. Dans l’assemblée de Vézelay, quand Louis VII eut pris la croix et que le gouvernement du royaume allait être confié à l’abbé Suger et au comte de Poitiers, celui-ci déclara qu’il voulait se faire moine.

Sous l’influence de ses deux protecteurs, l’abbaye se transforma complètement. Les Annales de Cîteaux et les Chroniques de Savoie nous autorisent à admettre que ce

  1. Hist. de Savoie, 235.
    Cibrario (Specchio cronologico, 19) place cette lutte en 1150 et ajoute qu’elle n’est point certaine.