Page:Histoire du donjon de Loches par M. Edmond Gautier.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

loin par son élévation et sa masse. Elle est le signe de la puissance du baron, sa principale force, son magasin, son dernier refuge. Sur elle convergeront tous les efforts des assaillants. Aussi chaque maître y ajoute quelque chose, augmente, conforte, agrandit, répare. Au XIe siècle, nous trouvons le donjon tel qu’il est aujourd’hui, avec son double rang de remparts, ses hourds. C’est à cette date que nous le prendrons pour l’étudier.

En nous supposant encore au dehors et en faisant abstraction d’un ouvrage fortifié, sorte de tête de pont qui se trouve cachée dans les soubassements de la maisonnette que nous voyons à notre gauche, auprès d’un magnifique marronnier d’Inde, nous avons devant nous un avant-corps garni d’un pont-levis : c’est évidemment un pont-levis du XVe siècle. L’avant-corps du XIIIe siècle était beaucoup moins important, comme on peut s’en assurer à l’intérieur. C’était la véritable entrée du donjon, et l’on n’y pénétrait probablement qu’au moyen d’une échelle[1].

Après avoir franchi ce premier passage, nous nous trouvons au niveau de la cour intérieure, dans un espace large de quelques mètres à peine, dans un angle où, du haut des murs, on peut écraser tous ceux qui oseraient s’y aventurer : pour plus de sûreté, les deux murs du donjon qui forment cet

  1. À cette époque toutes les portes sont considérablement élevées au-dessus du sol. On ne faisait donc pénétrer les approvisionnements à l’intérieur des places qu’à l’aide de trémies ou de ponts provisoires qu’on laissait subsister en temps de paix, et qu’on détruisait à la première alerte. On évitait par ce moyen les surprises des portes, qui devinrent fréquentes lorsque l’usage des ponts-levis se fut généralisé. Avec ce dernier système, il suffisait de faire verser une charrette à l’entrée du pont-levis pour embarrasser le passage et empêcher de relever le pont. L’entrée était alors au pouvoir des assaillants. Du Guesclin s’est plus d’une fois servi de ce stratagème avec succès.