Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/124

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nous dictant que la paix est une chose désirable, il s’ensuit que tous les moyens qui y conduisent ont la même qualité, et qu’ainsi la modestie, l’équité, la fidélité, l’humanité, la clémence (que nous avons démontrées nécessaires à la paix) sont des vertus et des habitudes qui composent les bonnes mœurs. je conclus donc que la loi de nature commande les bonnes mœurs et la vertu, en ce qu’elle ordonne d’embrasser les moyens de la paix, et qu’à juste titre elle doit être nommée loi morale.


XXXII. Mais d’autant que les hommes ne peuvent dépouiller entièrement cet appétit brutal, qui leur fait préférer les biens présents (quoique suivis infailliblement de plusieurs accidents imprévus) aux futurs, il leur arrive qu’encore qu’ils s’accordent tous en la louange des vertus mentionnées, toutefois ils ne demeurent pas d’accord de leur nature, et de ce en quoi chacune d’elles consiste. Car dès qu’une bonne action de quelqu’un déplaît à un autre, celui-ci lui impose le nom du vice auquel elle a quelque rapport : comme au contraire les méchancetés pour lesquelles on a de la complaisance sont revêtues du nom de quelque vertu qui en approche, et qui en a de l’air, s’il le faut ainsi dire. De là vient qu’une même action est louée de ceux-ci, et est nommée vertu, pendant que ces autres lui font le procès et la nomment un vice. Mais ce qui est de plus fâcheux, c’est que les philosophes