Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/275

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V. En cinquième lieu, c’est une opinion séditieuse d’estimer, que la puissance souveraine peut être partagée, et je n’en sache aucune de plus pernicieuse à l’État. Mais on en fait de différents partages : car il y en a qui la divisent en sorte qu’ils laissent l’autorité suprême sur les choses qui regardent la tranquillité publique, et les commodités de la vie présente au magistrat, ou au bras séculier ; mais pour celles qui touchent le salut de l’âme, ils en donnent la puissance à quelque autre. Sur quoi il arrive, à cause qu’il faut être par-dessus toutes choses juste, c’est-à-dire, homme de bien, afin de parvenir au salut éternel, que les particuliers mesurant la justice, non comme ils doivent, aux lois civiles, mais aux commandements et aux dogmes de ceux qui sont, à l’égard de l’État, des personnes privées ou étrangères : il arrive, dis-je, que les sujets refusent, par une crainte superstitieuse, de rendre à leurs princes l’obéis­sance qu’ils leur doivent, et que cette crainte les fait tomber dans l’inconvénient qu’ils veulent éviter. Or, qu’y a-t-il, je vous prie, de plus pernicieux à la société civile, que de faire peur aux hommes de tourments éternels pour les détourner de l’obéissance due à leurs princes, c’est-à-dire, pour les empêcher d’obéir aux lois et d’être justes. Il s’en trouve d’autres qui veulent partager la souveraineté en cette sorte. Ils donnent le commandement absolu en ce qui concerne la paix et la guerre à un seul, qu’ils nom­ment