Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/71

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VIII. Or, parce que ce serait en vain qu’on aurait droit de tendre à une fin, si on n’avait aussi le droit d’employer tous les moyens nécessaires pour y parvenir, il s’ensuit que, puisque chacun a droit de travailler à sa conservation, il a pareillement droit d’user de tous les moyens, et de faire toutes les choses sans lesquelles il ne se pourrait point conserver.


IX. Mais de juger si les moyens desquels quelqu’un se servira, et si les actions qu’il fera pour la conservation de sa vie, ou de ses membres, sont absolument néces­saires, ou non, c’est à lui du salut duquel il s’agit ; il en est le plus compétent juge selon le droit de nature. Et pour vous le montrer : si c’est une chose qui choque la droite raison que je juge du danger qui me menace, établissez-en donc juge quelque autre. Cela étant, puisqu’un autre entreprend de juger de ce qui me regarde ; pourquoi, par la même raison et selon l’égalité naturelle qui est entre nous, ne jugerai-je point réciproquement de ce qui le touche  ? Je me trouve donc fondé en la droite raison, c’est-à-dire, dans le droit de nature, si j’entreprends de juger de son opinion, d’exami­ner combien il importe que je la suive à ma conservation.


X. D’ailleurs la nature a donné à chacun de nous égal droit sur toutes choses. Je veux dire que dans un état purement naturel, * et avant que les hommes se fussent mutuellement attachés les uns aux autres par certaines conventions, il était permis à chacun de faire tout ce que