Page:Hobbes - Léviathan - Tome I.djvu/68

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meil, une trop grande chaleur à ces mêmes parties fait naître dans le cerveau des imaginations lubriques. En somme, les Rêves sont l’inverse des Imaginations[1] à l’état de veille. Le mouvement, quand nous sommes éveillés commence à un bout et quand nous Rêvons à un autre.

Les Apparitions ou Visions. — Là où il est le plus difficile de discerner le Rêve des pensées à l’état de veille, c’est lorsque quelque accident nous empêche de remarquer que nous avons dormi. Cela peut facilement arriver à celui dont l’esprit est plein de pensées terrorisantes, dont la conscience est grandement troublée et qui dort[2] sans s’être mis au lit et sans s’être dévêtu, comme quand on sommeille dans une chaise[3]. Car, celui qui [prend la peine de] s’organise [r] pour [se coucher et] dormir ne peut, lorsqu’il lui arrive une illusion insolite et extraordinaire, aisément penser qu’il s’agisse d’autre chose que d’un Rêve. Nous lisons que Marcus Brutus (un homme à qui Julius Cæsar avait fait grâce de la vie, qui était en outre son favori[4] et qui cependant l’assassina)[5] (43) vit à Philippes, la nuit avant de livrer bataille à Augustus Cæsar, une apparition terrorisante que les Historiens relatent d’habitude comme une Vision d’après les circonstances on peut aisément juger que ce ne fut qu’un court Rêve.

  1. Dans le texte latin Phantasmata.
  2. Le latin dit : « Cela peut facilement arriver à celui dont la conscience est inquiétée par la pensée d’un crime qu’il a fait ou qu’il se propose de faire et qui dort, etc… ».
  3. Le latin dit : « assis ou appuyé sur une chaise ».
  4. Le latin dit : « son ami ».
  5. Le latin dit : « et qui fut cependant assez ingrat pour l’assassiner ».