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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/164

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de l’honorable demoiselle, dans ce costume d’apparat, avait une majesté qui devait inspirer un profond respect, même à ce monde d’oisifs impertinents, qui promènent ordinairement dans les antichambres leur ennui et leur fatuité. Chacun se rangea humblement sur son passage, et, lorsqu’elle entra, le Roi lui-même se leva tout émerveillé, et vint à sa rencontre. Alors il vit rayonner les pierreries superbes du collier et des bracelets, et il s’écria : « Mon Dieu ! n’est-ce point la parure de Cardillac ! » Puis, se tournant vers madame de Maintenon, il ajouta avec un sourire plein de grâce : « Voyez, madame la marquise, notre belle dame porte le deuil de son malheureux époux ! — Ah ! Sire, répliqua mademoiselle de Scudéry, feignant de continuer la plaisanterie, serait-il donc convenable qu’une veuve accablée d’affliction se montrât parée aussi magnifiquement ? Non, certes, j’ai complètement abjuré cette union bizarre, et je ne penserais même plus à cet homme, sans le souvenir, qui vient m’assaillir quelquefois, de l’horrible spectacle dont je fus témoin, lorsque je vis passer près de moi son cadavre ensanglanté.

— Comment ! demanda le Roi, vous l’avez vu le pauvre diable ? » Alors, mademoiselle de Scudéry raconta brièvement, et sans faire d’abord aucune mention d’Olivier, comment le hasard l’avait amenée devant la maison de Cardillac, juste au moment où le meurtre venait d’être découvert. Elle dépeignit la violente douleur de Madelon, la profonde impression que la céleste enfant avait produite sur elle,