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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/223

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même. Mon grand-oncle le suivit, et il répétait derrière lui : « Mais voyez donc le drôle de corps !… »

Nous traversâmes de longs et hauts corridors, et la lumière vacillante que portait Franz jetait de singulières clartés dans l’épaisseur des ténèbres. Les formes vagues des chapiteaux, des piliers et des arceaux apparaissaient comme suspendues, çà et là, dans les airs. Pareilles à de sombres géants, nos ombres avançaient à nos côtés, et les images fantasques, qui couvraient les murs contre lesquels nous passions, avaient l’air de s’agiter et de trembler, et je croyais les entendre chuchoter d’une voix sourde au retentissement de notre marche : « Ne nous réveillez pas, ne nous réveillez pas, nous, peuple de magie, nous qui dormons sous ces vieilles pierres ! » Enfin, après avoir traversé une longue suite d’appartements froids et sombres, François nous ouvrit un salon, où pétillait un feu ardent de cheminée, qui nous accueillit, comme d’un joyeux salut, ainsi que des hôtes familiers.

Cet aspect me mit aussitôt en belle humeur. Mais mon grand-oncle s’arrêta au milieu de la salle, et, promenant ses regards à l’entour, dit d’un ton grave et presque solennel : « C’est donc cette pièce qui doit servir de salle d’audience ? » Franz avança vers le fond de la salle, et je vis alors sur la brune et large muraille une place blanchâtre de la grandeur d’une porte. « On y a déjà rendu des arrêts peut-être ? dit Franz d’une voix basse et contristée. — Que vous passe-t-il donc dans l’esprit ?