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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/227

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même et j’ai honte de ma peur enfantine ! Il se peut que la porte ait été ouverte par un courant d’air ou autrement. — Mon esprit trop exalté transforme les accidents les plus naturels en apparitions merveilleuses. — Ce n’est rien.

Rassuré de la sorte, je ramasse mon livre et je me rejette dans le fauteuil. Alors j’entends des pas légers et mesurés traverser lentement le salon, on gémit, on soupire par intervalles, et ces soupirs plaintifs accusent une douleur inconsolable et le plus profond désespoir. — Ah ! c’est quelque animal souffreteux enfermé à l’étage de dessous. On connait ces illusions acoustiques de la nuit qui rapprochent les sons produits à certaines distances. Comment se laisser intimider par si peu de chose ? — C’est ainsi que je me raisonnais moi-même ; mais voici que l’on gratte à l’endroit nouvellement muré, et des gémissements plus profonds et plus lamentables semblent être arrachés aux angoisses d’une horrible agonie.

« Oui, sans doute, me dis-je, c’est un pauvre animal enfermé là. Je n’ai qu’à frapper violemment du pied sur le plancher, et tout redeviendra tranquille, ou bien la bête avertie poussera d’autres cris auxquels je devrai facilement la reconnaitre. » Telle était ma volonté intime : mais déjà le sang était arrêté dans mes veines ; les membres raidis et le front baigné d’une sueur froide, je reste cloué sur le fauteuil, incapable de me lever, et encore moins d’appeler. À la fin le grattement effroyable cesse, et le bruit de pas dans la salle se fait entendre de nouveau. —