Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/374

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à cette source divine d’une force et d’une vertu magiques.

— Garde à nous ! dit le baron, Ottmar va remonter aussitôt sur son cheval de bataille pour faire une nouvelle excursion dans les régions inconnues, que nous autres mécréants, à ce qu’il prétend, ne pouvons entrevoir que de loin, comme Moïse la terre promise ; mais nous tâcherons de rendre ce brusque départ impraticable. Il fait une bien vilaine nuit d’automne : qu’en dites-vous ? Si nous restions encore à jaser une petite heure, si nous activions le feu mourant de la cheminée, et si Maria nous préparait à sa manière un excellent punch, ce serait une source où s’abreuverait du moins volontiers notre humeur vive et joyeuse. » Bickert leva les yeux au ciel d’un air extasié, poussa un profond soupir, et puis se pencha devant Maria avec une attitude humblement suppliante. Maria, qui était restée assise et silencieuse livrée à une secrète méditation, partit d’un franc éclat de rire, ce qu’il lui arrivait de faire très rarement, en voyant la posture grotesque du vieux peintre, et elle s’empressa de se lever pour tout préparer soigneusement suivant le désir de son père.

Bickert trottait çà et là d’un air affairé ; il aidait Kaspar à apporter du bois, et, tandis qu’il soufflait le feu, agenouillé de profil devant la cheminée, il réclamait instamment d’Ottmar qu’il se montrât un peu son digne élève, en le dessinant dans celle position comme une parfaite étude, sans omettre de rendre exactement les beaux reflets dont la flamme éclairait en ce moment son visage.