Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/50

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il comprit alors quel excès de malheur avait eu à subir la pauvre Angela.

« Angela, dit-il d’une voix sourde, ma femme en décidera. » Et il suivit le colonel qui précipita ses pas.

Lorsqu’ils furent arrivés, comme le colonel avait déjà posé la main sur la porte de la chambre d’Angela, le chevalier le repoussant vivement lui dit : « Ma femme dort, voulez-vous troubler son sommeil ? — Hum ! répliqua le colonel, Angela a-t-elle jamais goûté un sommeil paisible depuis que vous l’avez vouée à de si misérables angoisses ? »

Le colonel se disposait à entrer, alors le chevalier se prosterna à ses pieds et s’écria dans un affreux désespoir : « Soyez miséricordieux ! par grâce !… après m’avoir réduit à la mendicité, laissez, laissez moi ma femme !

— C’est ainsi que le vieux Vertua était devant vous, homme pervers et insensible, sans qu’il ait pu attendrir votre cœur de pierre. Subissez donc la vengeance du ciel ! »

Il dit, et se dirigea de nouveau vers la chambre d’Angela. Le chevalier s’élança avant lui, ouvrit la porte, courut ouvrir les rideaux du lit et s’écriant : « Angela, Angela ! » il se pencha sur elle, prit sa main…, puis s’arrêtant tout-à-coup saisi d’un tremblement convulsif, il cria d’une voix tonnante : « Regardez ! vous avez gagné le cadavre de ma femme ! »

Le colonel approcha du lit avec horreur. — Aucun signe de vie. Angela était morte, — morte !