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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/79

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Alors il s’approcha d’elle, et le sourire, qui, peu de minutes auparavant, se jouait sur ses lèvres, rendit à ses traits une expression gracieuse ; il déplia de nouveau le placet, et, se penchant vers la demoiselle, lui dit d’une voix douce : « La marquise ne veut pas entendre parler des galanteries de nos jeunes seigneurs, et s’esquive d’une manière tant soit peu suspecte. Mais vous, mademoiselle, que pensez-vous de cette requête poétique ? » Mademoiselle de Scudéry se leva respectueusement de son siège, une rougeur passagère vint colorer, comme la pourpre du couchant, les joues pâles de la digne vieille dame, et, les yeux baissès, elle dit en s’inclinant à demi :

« Un amant qui craint les voleurs
« N’est point digne d’amour. »

Le roi, charmé de l’esprit chevaleresque de cette brève sentence qui réfutait toute la pétition et ses prétentieuses tirades, s’écria les yeux étincelants : « Par saint Denis ! vous avez raison, mademoiselle ! Point de mesure aveugle qui puisse exposer l’innocent à être confondu avec le coupable, dans le but de protéger la lâcheté : — que D’Argenson et La Reynie fassent leur devoir ! »