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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/94

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vous prouver la sincérité de mes respectueux sentiments. »

Comme mademoiselle de Scudéry hésitait cependant encore, madame de Maintenon prit la cassette des mains de Cardillac en disant « Au nom du ciel ! mademoiselle, pourquoi toujours mettre votre grand âge en avant ? Qu’avons-nous, vous et moi, à nous inquiéter des années et de leur nombre ? — Et n’agissez-vous pas en ce moment comme une jeune fille timide à qui l’on offre un excellent fruit, et qui le saisirait avec tant d’empressement, si cela pouvait se faire sans main à avancer et sans doigts à ouvrir ? — Et comment refusez-vous, au brave maître Réné, d’accepter, en don volontaire, ce que mille autres ne peuvent obtenir, malgré tout l’or, toutes les peines et les supplications du monde. »

Madame de Maintenon avait contraint, en parlant, mademoiselle de Scudéry à prendre la cassette. Alors Cardillac se jeta à ses genoux de nouveau, pour baiser sa robe, ses mains, — avec des pleurs, des gémissements, des sanglots ; — puis il se releva, et sortit en courant comme un insensé, heurtant les siéges et les tables, au point que les verres et les porcelaines en résonnèrent.

Mademoiselle de Scudéry s’écria saisie d’effroi : « Au nom de tous les saints, que prend-il à cet homme ! » Mais la marquise, animée d’une gaîté singulière, partit d’un éclat de rire, et avec un ton d’espièglerie fort rare dans sa bouche : « Voilà ce que c’est, dit-elle, mademoiselle ; maître Réné est amoureux fou de vous, et, suivant l’usage convenable