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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 4, trad. Egmont, 1836.djvu/34

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yeux étincelants arrêter sur moi leur effroyable regard !

Bref, toutes ces superstitions de l’enfance me revinrent à l’esprit, et un frisson glacial parcourut mes veines. Je voulus jeter le miroir loin de moi : je ne pus le faire. Alors les yeux divins de la charmante inconnue se tournèrent vers moi, oui, je ne pus me tromper sur la direction de ses tendres regards, et je sentis mon cœur embrasé de leurs rayons. Le sentiment d’effroi qui m’avait saisi s’évanouit et fit place à une impression de langueur voluptueuse et pénible à la fois, pareille à l’effet d’une secousse électrique.

« Vous avez là un joli miroir ! » dit une voix à mon oreille. Je me réveillai comme d’un rêve, et je ne fus pas médiocrement surpris en me voyant entouré de visages inconnus qui souriaient d’un air équivoque. Plusieurs personnes étaient venues s’asseoir sur le même banc, et il était indubitable que je leur avais donné motif de se récréer à mes dépens avec mes regards fixement arrêtés sur le miroir, et peut-être aussi par plus d’une grimace étrange, résultat de mon exaltation intérieure.

« Vous avez là un fort joli miroir, répéta le même individu voyant que je ne songeais guère à lui répondre, et joignant à sa question un regard significatif ; mais dites-moi, je vous prie, quel est le sujet de cette assidue contemplation de votre part, monsieur ? êtes-vous en commerce avec les esprits ?… »

Il y avait dans le son de voix, dans le regard de cet homme, déjà passablement âgé et fort propre-