Page:Holbach - Traité des trois imposteurs, ed. de Londres, 1777.djvu/16

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est fait pour eux, se sont fait un point de Religion d’appliquer tout à eux-mêmes, & de juger des choses par le profit qu’ils en retirent. C’est là-dessus qu’ils ont formé des notions qui leur servent à expliquer la nature des choses, à juger du bien & du mal, de l’ordre & du désordre, du chaud & du froid, de la beauté & de la laideur, &c., qui dans le fond ne sont point ce qu’ils s’imaginent : maîtres de former ainsi leurs idées, ils se flattèrent d’être libres  ; ils se crurent en droit de décider de la louange & du blâme, du bien & du mal  ; ils ont appelé bien ce qui tourne à leur profit & ce qui regarde le culte divin & mal au contraire, ce qui ne convient ni à l’un ni à l’autre : & comme les ignorans ne sont capables de juger de rien, & n’ont aucune idée des choses que par le secours de l’imagination qu’ils prennent pour le jugement, ils nous disent que l’on ne connoît rien dans la nature, & se figurent un ordre particulier dans le monde. Enfin ils croient les choses bien ou mal ordonnées, suivant qu’ils ont de la facilité ou de la peine à les imaginer, quand le sens les leur représente  ; & comme on s’arrête volontiers à ce qui fatigue le moins le cerveau, on se persuade d’être bien