Page:Homère - Iliade, trad. Leconte de Lisle.djvu/102

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du magnanime Stentôr à la voix d’airain, qui criait aussi haut que cinquante autres :

— Honte à vous, ô Argiens, fiers d’être beaux, mais couverts d’opprobre ! Aussi longtemps que le divin Akhilleus se rua dans la mêlée, jamais les Troiens n’osèrent passer les portes Dardaniennes ; et, maintenant, voici qu’ils combattent loin d’Ilios, devant les nefs creuses !

Ayant ainsi parlé, elle ranima le courage de chacun. Et la déesse Athènè aux yeux clairs, cherchant le Tydéide, rencontra ce roi auprès de ses chevaux et de son char. Et il rafraîchissait la blessure que lui avait faite la flèche de Pandaros. Et la sueur l’inondait sous le large ceinturon d’où pendait son bouclier bombé ; et ses mains étaient lasses. Il soulevait son ceinturon et étanchait un sang noir. Et la Déesse, auprès du joug, lui parla ainsi :

— Certes, Tydeus n’a point engendré un fils semblable à lui. Tydeus était de petite taille, mais c’était un homme. Je lui défendis vainement de combattre quand il vint seul, envoyé à Thèbè par les Akhaiens, au milieu des innombrables Kadméiônes. Et je lui ordonnai de s’asseoir paisiblement à leurs repas, dans leurs demeures. Cependant, ayant toujours le cœur aussi ferme, il provoqua les jeunes Kadméiônes et les vainquit aisément, car j’étais sa protectrice assidue. Certes, aujourd’hui, je te protège, je te défends et je te pousse à combattre ardemment les Troiens. Mais la fatigue a rompu tes membres, ou la crainte t’a saisi le cœur, et tu n’es plus le fils de l’excellent cavalier Tydeus Oinéide.

Et le brave Diomèdès lui répondit :

— Je te reconnais, Déesse, fille de Zeus tempêtueux. Je te parlerai franchement et ne te cacherai rien. Ni la crainte ni la faiblesse ne m’accablent, mais je me souviens de tes ordres. Tu m’as défendu de combattre les Dieux heureux, mais de frapper de l’airain aigu Aphroditè, la fille de Zeus,