Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/58

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que as vu. Je t'en supplie, si jamais mon père, le brave Odysseus, par la parole ou par l'action, a tenu ce qu'il avait promis, chez le peuple des Troiens, où les Akhaiens ont subi tant de misères, souviens-t'en et dis-moi la vérité.

Et, avec un profond soupir, le blond Ménélaos lui répondit :

— Ô Dieux ! certes, des lâches veulent coucher dans le lit d'un brave ! Ainsi une biche a déposé dans le repaire d'un lion robuste ses faons nouveau-nés et qui tettent, tandis qu'elle va paître sur les hauteurs ou dans les vallées herbues ; et voici que le lion, rentrant dans son repaire, tue misérablement tous les faons. Ainsi Odysseus leur fera subir une mort misérable. Plaise au père Zeus, à Athènè, à Apollôn, qu'Odysseus se mêle aux Prétendants tel qu'il était dans Lesbos bien bâtie, quand se levant pour lutter contre le Philomèléide, il le terrassa rudement. Tous les Akhaiens s'en réjouirent. La vie des Prétendants serait brève et leurs noces seraient amères ! Mais les choses que tu me demandes en me suppliant, je te les dirai sans te rien cacher, telles que me les a dites le Vieillard véridique de la mer. Je te les dirai toutes et je ne te cacherai rien. Malgré mon désir du retour, les Dieux me retinrent en Aigyptiè, parce que je ne leur avais point offert les hécatombes qui leur étaient dues. Les Dieux, en effet, ne veulent point que nous oubliions leurs commandements. Et il y a une île, au milieu de la mer onduleuse, devant l'Aigyptiè, et on la nomme Pharos, et elle est éloignée d'autant d'espace qu'une nef creuse, que le vent sonore pousse en poupe, peut en franchir en un jour entier. Et dans cette île il y a un port excellent d'où, après avoir puisé une eau profonde, on traîne à la mer les nefs égales. Là, les Dieux me retinrent vingt jours, et les vents marins ne soufflèrent point qui mènent les nefs sur le large dos de la mer. Et mes vivres étaient déjà épuisés, et l'esprit de mes hommes était abattu,