Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/252

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Pour mille bons endroits, les chameaux ont un vice ;
Ce n’est pas trop ; le pied leur glisse ;
Ils sont sujets à s’écarter.
Ceci posé, je puis conter
Comme un chameau, d’ailleurs fort sage et fort honnête,
S’enorgueillit d’un cas qui lui tourna la tête.
Avec ce monsieur-là, ceux qui le conduisoient
Alloient passer un mont fort rude.
Le chameau patissoit ; ses pieds s’y refusoient ;
Nos gens sont en inquiétude ;
Pour rendre le chemin moins glissant et plus beau,
Ils mettoient des tapis sous les pieds du chameau.
À la précaution qu’il prend pour déférence,
Le chameau se rengorge ; il vous fait le gros dos ;
Compte ses pas, comme un pedant ses mots,
Et marche gravement ainsi qu’une éminence.
À passer la montagne il met le jour entier ;
Et la nuit toute entiere il rêve
À l’honneur du tapis ; le sommeil n’y fait trêve ;
Il ne dort point, de peur de l’oublier.
Mais quand, le lendemain, on veut qu’à l’ordinaire,
Pour recevoir sa charge il baisse les genoux,
Qu’est-ce, messieurs ? êtes-vous fous,
Dit le superbe dromadaire ?