Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/267

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LE TYRAN DEVENU BON

Non, il n’est rien de ce que nous voyons
Qui ne parle et ne nous instruise.
Tout est matiere à nos réflexions ;
Tout évenement moralise.
Sçachons donc réfléchir, méditer, raisonner ;
Sans ce point là l’homme et la bête
Sont même chose : on pourroit les donner
L’un pour l’autre, tête pour tête.
Ne comptons point sur les avis d’autrui :
Ils ne causent souvent que colere ou qu’ennui.
De tout censeur, quel qu’il puisse être,
Le sermon nous est odieux ;
Quand on se parle, on s’écoute bien mieux ;
Pour être bon disciple, il faut être son maître.
Pourquoi cela ? Demande-t-on.
En voici, je croi, la raison.
C’est qu’on ne sent quand un autre nous blâme
Que la honte d’être en son tort :
Sentiment douloureux qui repousse notre ame.
Et qui lui seul épuise son effort.
Mais, quand soi-même on sçait se faire entendre
Que la raison nous doit donner la loi,