Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/237

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Lisette. Elle se nommait mademoiselle Judith. C’est Béranger qui lui donna le nom de Lisette, comme s’il eût cherché une rime à Grisette. J’ai déjeuné quatre fois chez Béranger, qui a bien voulu dîner deux fois chez moi, quand nous étions voisins à Beaujon. La seconde fois, j’avais presque décidé Lisette à être du dîner, comme une maîtresse légitime qu’elle était. Il ne manquait guère que les sacrements à cette union. Certes, ceux-là n’eussent jamais divorcé, tant c’étaient deux braves cœurs allumés l’un par l’autre. Lisette chantait les chansons de Béranger. Ç’avait été la Muse du chansonnier. Elle avait eu quelque beauté et beaucoup de charmes. Je lui dis qu’on reconnaissait bien en elle la Muse du poète.

— Oh la Muse ! non, me répondit-elle ; mais j’étais souvent son dictionnaire de rimes.

Elle était mieux que cela, elle était sa cuisinière. Même les grands jours, quand il y avait deux amis à la table, c’était elle qui veil-