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LANGAGE ARTICULÉ DANS l’HISTOIRE NATURELLE.

sauvages. Nous n’avons que faire de reproduire ici les assertions fort catégoriques, et que l’on a vainement révoquées en doute, d’une foule d’observateurs désintéressés. L’on a prétendu que les peuples vivant sans dogmes et sans culte croyaient au moins à des forces et à des manifestations surnaturelles. Mais il est certain, il est évident que l’infériorité même de ces peuples leur rend impossible toute distinction du naturel et du soi-disant surnaturel. Il en faut toujours revenir à cette terreur très-explicable dont nous parlions tout à l’heure, à la crainte d’un inconnu, ou, pour mieux dire, de l’inconnu. S’il convient de voir là une croyance, il n’est point alors d’animal, même très-inférieur, à qui l’on puisse contester la religiosité.

Nous ne voulons pas nous appesantir sur la dernière objection, la prétendue caractéristique tirée de la moralité. C’est un fait avéré qu’elle manque tout aussi bien chez beaucoup de peuples sauvages, comme nous l’enseigne l’ethnographie, et qu’on la rencontre évidente, éclatante, dans les actes d’un grand nombre d’animaux, au moins d’animaux sociables.

C’est la faculté du langage articulé qu’il faut invoquer, en définitive, pour distinguer l’homme de ses frères inférieurs. Chez aucun de ces derniers, en effet, l’on n’a pu rencontrer cette faculté. On n’a que faire d’arguer ici des paroles du perroquet, paroles articulées sans doute, mais dont l’émission est essentiellement distincte d’une conception corrélative ; il s’entend de soi que cette corrélation, cette connexité, est précisément la caractéristique du langage articulé humain : le perroquet n’est qu’un écho inconscient.

Par contre, cette caractéristique du langage articulé est commune à toutes les races humaines. C’est là un fait concluant. Si baroques que nous puissent sembler les idiomes des dernières couches de l’humanité, elles n’en