Page:Hovelacque - La Linguistique.djvu/73

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
55
LE TIBÉTAIN.

encore usité, était celui qui avait cours dans l’Inde septentrionale ; son origine est parfaitement évidente, et quiconque lit le caractère hindou dévanâgarî apprend en quelques heures l’alphabet tibétain, qui en provient directement.

Les différents auteurs qui ont écrit sur le tibétain n’ont pas mis suffisamment en lumière le caractère monosyllabique de cette langue. Les procédés qu’elle emploie sont analogues à ceux dont se servent le chinois, l’annamite et les autres langues isolantes.

C’est ainsi que le tibétain ne connaît dans les noms ni genre ni nombre. Pour exprimer le genre d’un nom, il doit le faire accompagner d’un autre mot dont le sens est celui de mâle ou de femelle : ra pho « bouc » ra ma « chèvre ». De même il ne peut exprimer le pluriel qu’en adjoignant au nom qui doit comporter cette idée de pluralité un autre mot dont le sens est, pour l’ordinaire, celui de tout ou de multitude.

Les prétendus cas du tibétain sont aussi peu des cas que ne le sont ceux qu’on attribue au chinois ou à l’annamite ; ici également on emploie pour déterminer la racine pleine, le mot plein, des mots qui deviennent vides, c’est-à-dire qui perdent une partie de leur sens premier et servent en quelque sorte d’adjoints au mot principal.

Par lui-même, le mot n’est pas plus un simple nom (substantif ou adjectif) qu’il n’est un verbe. C’est la position dans la phrase ou l’adjonction de telle ou telle racine dite vide, qui peut résoudre ce problème.

Après tout ce que nous avons dit des langues monosyllabiques en général, et du chinois en particulier, il nous semble inutile d’examiner d’une façon plus minutieuse la structure du tibétain. Elle n’est pas différente de la structure des autres langues isolantes, et il ne faut point se laisser prendre à ce que les grammaires ordinaires di-