Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/221

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y en eut d'autres qui assurèrent tout-à-fait le contraire. La caravane se trouva dès lors divisée en deux camps, celui du mouvement et celui de la résistance ; ou, en d'autres termes, il y eut les progressifs et les stationnaires. On comprend qu'en notre qualité de citoyens français, nous nous rangeâmes instinctivement du côté des progressifs, c'est-à-dire, de ceux qui voulaient marcher, et en finir le plus tôt possible avec cette fâcheuse montagne. Il nous parut, au reste, que la logique était en faveur de notre parti. Le temps était présentement calme, et nous ne savions pas co qu'il serait le lendemain. Nous nous mîmes donc à escalader ces montagnes de neige, quelquefois à cheval et souvent à pied. Dans ce dernier cas, nous faisions passer devant nous nos animaux, et nous nous cramponnions à leur queue. Ce moyen est sans contredit le moins fatigant qu'on puisse imaginer pour gravir des montagnes. M. Gabet souffrit horriblement ; mais enfin, Dieu, dans sa bonté infinie, nous donna assez de force et de courage pour arriver jusqu'au bout. Le temps fut constamment calme, et nous ne fûmes écrasés par aucune espèce d'avalanche.

Le lendemain, dès la pointe du jour, le parti stationnaire se mit en marche, et traversa la montagne avec succès. Comme nous avions eu l'honnêteté de l'attendre, il se joignit à nous, et nous entrâmes ensemble dans une vallée dont la température n'était pas excessivement rigoureuse. La bonté des pâturages engagèrent la caravane à y prendre un jour de repos. Un lac profond où nous creusâmes des puits dans la glace, nous fournit de l'eau en abondance. Le chauffage ne nous manqua pas non plus, car les ambassades