Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/72

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Les soldats chinois n'avaient pas été si simples ; ils n'étaient partis, pour cette expédition guerrière, qu'accompagnés d'un grand nombre d'ânes et de bœufs, chargés de batteries .... de cuisine et de munitions .... de bouche.

Comme il leur importait fort peu d'aller se battre pour deux mille bœufs qui ne leur appartenaient pas, après une petite promenade militaire, ils s'étaient arrêtés le long d'une rivière, et avaient passé là quelques jours, buvant, mangeant, jouant et se divertissant. sans se mettre plus en peine des brigands, que s'il n'en eût jamais existé au monde. Quand ils eurent consommé leurs provisions, ils revinrent tout doucement à Tang-Keou-Eul, et déclarèrent au Mandarin qu'ils avaient parcouru tout le désert, sans pouvoir atteindre les brigands ; qu'une fois, ils avaient été sur le point de les saisir ; mais qu'ils avaient usé de leurs moyens magiques, et que tout s'était évanoui. A Tang-Keou-Eul, on est persuadé que les brigands sont tous plus ou moins sorciers ; que pour se rendre invisibles, ils n'ont besoin que de souffler en l'air, ou de jeter derrière eux quelques crottes de mouton. Il est probable que ce sont les soldats chinois qui ont accrédité ces fables. Ce qu'il y a de certain, c'est que dans toutes leurs expéditions, elles leur servent merveilleusement. Les Mandarins, sans doute, n'en sont pas les dupes ; mais pourvu que les victimes des voleurs s'en contentent, c'est tout ce qu'il leur faut.

Pendant plusieurs jours, les Houng-Mao-Eul furent furieux. Ils parcouraient les rues, agitant leurs sabres, et vociférant mille imprécations contre les brigands. Personne n'osait se présenter sur leur passage ; on respectait