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CORRESPONDANCE. — 1847.

Au Maréchal Bugeaud[1].


Monsieur le Maréchal,

Permettez-moi d’introduire près de vous et de recommander à votre gracieux accueil mon frère aîné, le comte Abel Hugo. Ce n’est pas seulement le fils d’un de vos anciens et illustres compagnons d’armes, c’est aussi le frère d’un homme qui honore votre énergique caractère et vos grands travaux. Mon frère partage, monsieur le Maréchal, tous mes sentiments pour vous. Il est heureux de vous approcher et de vous entendre, permettez-moi d’espérer que vous voudrez bien l’accueillir comme vous m’accueilleriez moi-même. Je ne vous parle pas de l’élévation de ses vues et de l’étendue de ses idées, vous l’apprécierez. Mais, ce que je puis dire dès à présent, c’est qu’il est bon que des hommes comme lui visitent, connaissent et épousent l’Algérie.

J’ai reçu et lu avec un haut intérêt l’excellent travail[2] que vous avez bien voulu m’envoyer, et où j’ai retrouvé avec bonheur les idées et les paroles de cette conversation de deux heures qui m’a laissé un profond souvenir.

Agréez, monsieur le Maréchal, la nouvelle assurance de ma haute considération.

Victor Hugo.
Paris, 9 novembre 1846[3].


1847.


À Victor Foucher[4].


Paris, 11 janvier 1847.

Voici, mon cher Victor, un brave et courageux homme digne de tout ton intérêt. Il s’appelle M. Pierre Cauwet[5], et il te remettra cette lettre. Il est ouvrier et homme de lettres, je l’aime à ce double titre. Il a femme,

  1. Inédite. — Le maréchal Bugeaud entra, à vingt ans, dans les grenadiers de la garde impériale, ce qui ne l’empêcha pas de se rallier en 1814 aux Bourbons qu’il abandonna d’ailleurs bientôt pour rejoindre Napoléon. Remis en activité après 1830, élu député de la Dordogne en 1831, il joua un triste rôle dans la captivité de la duchesse de Berry au fort de Blaye. Envoyé en Afrique en 1836, il s’y montra organisateur et consolida la conquête de l’Algérie dont il devint gouverneur général en 1840. Dur et cruel avec ses ennemis, il était plein de sollicitude pour ses compagnons d’armes qui l’avaient surnommé le père Bugeaud. En 1848 il fut élu par le département de la Charente inférieure et mourut du choléra l’année suivante.
  2. Quelques réflexions sur trois questions fondamentales de notre établissement en Algérie.
  3. Collection de M. Merle. Alger.
  4. Inédite.
  5. Pierre Cauwet était en relations avec les principaux écrivains de l’époque ; il fit paraître plus tard dans l’Événement (10 mai 1851) un feuilleton très intéressant contenant des lettres de Victor Hugo, Béranger, etc.