Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome II.djvu/19

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À Madame Henriette Vauthier.


Madame,

Je ne suis rien qu’un homme honnête et je n’ai pas d’autre passion parmi les hommes que la justice et la vérité, je suis de ceux qui souffrent, avec ceux qui aiment, avec ceux qui travaillent, je hais toutes les formes de la tyrannie et je n’ai qu’un vœu dans ce monde, faire tomber les armes et les chaînes.

Votre lettre si noble et si douloureuse va au fond de mon cœur. Si je devais être récompensé, madame, vos remerciements me récompenseraient bien au delà du peu que j’ai fait et du peu que je vaux ; dites à celui que vous aimez et dans lequel vous souffrez que ma main se tend vers lui fraternellement. Hélas ! pourquoi donc dans cette France y a-t-il encore des haines ?

Veuillez recevoir, madame, l’hommage de mon douloureux respect.

Victor Hugo[1].
7 avril 1850. Dimanche.


À Monsieur Allier,
directeur-fondateur de Petit-Bourg[2].


2 juin 1850.
Monsieur,

Lorsque, il y a deux ans, le conseil d’administration de la colonie de Petit-Bourg m’offrit, avec une unanimité qui est pour moi un bien précieux souvenir, l’honneur de le présider, une pensée que vous voulûtes bien, vous, monsieur, particulièrement faire valoir près de moi, détermina, vous vous en souvenez, mon acceptation ; ce fut l’idée qu’il me serait donné peut-être d’être utile à ces pauvres enfants du peuple pour lesquels est instituée votre

  1. Jean Pierre Barbier. Juliette Drouet, sa vie, son œuvre.
  2. Inédite. — La colonie de Petit-Bourg adoptait les enfants pauvres, les orphelins et les enfants trouvés de Paris ; après la révolution de Février 1848, elle recueillit aussi les jeunes détenus au-dessous de 16 ans « acquittés comme ayant agi sans discernement ». En décembre 1848, Victor Hugo avait sollicité pour Petit-Bourg le patronage du président de la République, mais en 1850, passé définitivement dans les rangs de l’opposition, il craignit pour la colonie la suppression de la subvention du gouvernement.