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ODES ET BALLADES.

Pour récompenser ou punir,
Et, parlant plus haut dans notre âge
Que la flatterie et l’outrage,
Dicte l’histoire à l’avenir !

Puisqu’il n’est plus d’autres miracles
Que les hommes nés parmi nous,
Tu succèdes aux vieux oracles
Que l’on écoutait à genoux.
À ta voix, qui juge les races,
Nos demi-dieux changent de places,
Comme, à des chants mystérieux,
Quand la nuit déroulait ses voiles,
Jadis on voyait les étoiles
Descendre ou monter dans les cieux !

Pour mériter ce rang auguste
Aux vertus par le ciel offert,
Qui plus que lui fut noble et juste ?
Et qui, surtout, a plus souffert !
Cet homme a payé tant de gloire
Par des malheurs que la mémoire
Ne peut rappeler sans effroi ;
C’est un enfant des scandinaves ;
C’est Gustave, fils des Gustaves ;
C’est un exilé ; — c’est un roi !


III



Il avait un ami dans ses fraîches années,
Comme lui tout empreint du sceau des destinées.
C’est ce jeune d’Enghien qui fut assassiné !
Gustave à ce forfait se jeta sur ses armes ;
Mais, quand il vit l’Europe insensible à ses larmes,
Calme et stoïque, il dit : « Pourquoi donc suis-je né ?