Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome I.djvu/652

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Léon aux lions d’or, Castille aux tours d’argent,

Les chaînes des Navarres.


Rome a les clefs ; Milan, l’enfant qui hurle encor

Dans les dents de la guivre ;

Et les vaisseaux de France ont des fleurs de lys d’or

Sur leurs robes de cuivre.


Stamboul la turque autour du croissant abhorré

Suspend trois blanches queues ;

L’Amérique enfin libre étale un ciel doré

Semé d’étoiles bleues.


L’Autriche a l’aigle étrange, aux ailerons dressés,

Qui, brillant sur la moire,

Vers les deux bouts du monde à la fois menacés

Tourne une tête noire.


L’autre aigle au double front, qui des czars suit les lois,

Son antique adversaire,

Comme elle regardant deux mondes à la fois,

En tient un dans sa serre.


L’Angleterre en triomphe impose aux flots amers

Sa splendide oriflamme,

Si riche qu’on prendrait son reflet dans les mers

Pour l’ombre d’une flamme.


C’est ainsi que les rois font aux mâts des vaisseaux

Flotter leurs armoiries,

Et condamnent les nefs conquises sur les eaux

À changer de patries.


Ils traînent dans leurs rangs ces voiles dont le sort

Trompa les destinées,

Tout fiers de voir rentrer plus nombreuses au port

Leurs flottes blasonnées.