Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome X.djvu/190

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LISON, reculant.

Quelle est ta reine ? Vous, madame. C’est obscur,
Mais charmant. Suis-je en vie ? Oh ! l’extase m’accable.
Suis-je morte ?

Pendant qu’elle regarde le nain, le miroir et l’épi de diamants sur sa tête, un collier vient se poser sur sa gorge et sur ses épaules nues. Elle s’écrie.

Suis-je morte ? Un collier tout en perles !

Elle se retourne et voit un nègre. Ce nègre vient de sortir du massif, et c’est lui qui lui a agrafé le collier au cou, sans être aperçu d’elle. Il est vêtu de velours feu. Lison le regarde, pas effarouchée.

Suis-je morte ? Un collier tout en perles ! Le diable !
Je comprends.

On entend une musique sous les arbres et une vague chanson murmurée qui semble chantée au loin par des passants invisibles.
Chanson.

Je comprends. — Les lutins — dans les thyms — les hautbois —
Dans les bois — les roseaux — dans les eaux — ont des voix. —
Donc faisons — des chansons — et dansons. — L’aube achève —
Notre rêve — et l’amour — c’est le jour. —

LISON, pâmée et fascinée.

Notre rêve — et l’amour — c’est le jour. — Je suis Ève !

Une fumée se disperse dans les branches.

Qu’est-ce que cet encens dans l’ombre répandu ?
Je sens comme une odeur de paradis.

GALLUS, paraissant.

Je sens comme une odeur de paradis. Perdu.
Enfin ! je tiens mon rêve !

Gallus, sorti du massif, laisse tomber son manteau. Il apparaît vêtu de brocart d’or de la tête aux pieds, avec son cordon bleu et sa plaque d’ordres. Il a sur la tête un panache couleur feu. Il se dresse devant Lison.
LISON.

Enfin ! je tiens mon rêve ! Un homme fait de flamme !

On aperçoit dans les arbres Gunich au guet, caché par l’ombre du bois.
GALLUS, immobile, l’œil fixé sur Lison. À part.

D’abord disons-lui tu. Le bonheur de la femme