Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome X.djvu/193

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C’est là le réel. Point de rêve. Rien de fou,
tout est simple, et la fable en vérité s’achève.

LISON, comme somnambule et l’œil égaré.

Ce réel est déjà très joli comme rêve.

GALLUS.

Fantastique grenier d’un palais incertain,
Le rêve est le cinquième étage du destin,
Et la réalité, c’est le rez-de-chaussée.
Restons en bas. Je suis un prince ; ma pensée,
C’est de jouir ; je vais, tâchant de peu vieillir.
Suis-je un songe-creux ? Non. Mais je voudrais cueillir
Le divin rameau d’or où l’oiseau bleu se perche.
L’homme ayant égaré le bonheur, je le cherche.
Comment t’appelles-tu ?

LISON.

Comment t’appelles-tu ? Monseigneur…

GALLUS, la contemplant. — À part.

Comment t’appelles-tu ? Monseigneur… C’est vraiment
Mon idéal. Le diable a fait évidemment
Tant de perfections pour y loger des vices.
Une telle rencontre est un des grands services
Que peut rendre l’enfer à quelqu’un d’ennuyé.
Elle a tout. Front pensif, air sauvage, œil noyé,
Bouche à dents de souris qui doit haïr le jeûne,
Mains qui doivent haïr le vil travail.

LISON, revenant peu à peu à la réalité. — À part.

Mains qui doivent haïr le vil travail. Pas jeune.
Ce n’est pas encor ça.

Ce n’est pas encor ça. Le regardant en dessous.

Ce n’est pas encor ça. Tout doré. De beaux yeux.
Plus de jeunesse avec moins de dorure est mieux.
Mais il a l’air d’avoir bien de l’esprit.