Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome X.djvu/284

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Nous sommes, dans l’étendue,
La même barque perdue
Au même écueil.



II


Tous ces patrons, tous ces mousses,
Qu’appelaient tant de voix douces
Et tant de vœux,
Ils sont mêlés à l’espace,
Et le poisson d’argent passe
Dans leurs cheveux.

Au fond des vagues sans nombre,
On voit, sous l’épaisseur sombre
Du flot bruni,
Leur bouche ouverte et terrible
Qui boit la stupeur horrible
De l’infini.

Ils errent, blêmes fantômes.
Ils ne verront plus les chaumes
Au pignon noir,
Les bois aux fraîches ramées,
Les prés, les fleurs, les fumées
Dans l’or du soir.

Dans leurs yeux l’onde insensée,
Qui fuit sans cesse, poussée
Du vent hagard,
Remplace, sombre passante,
La terre, à jamais absente
De leur regard.