Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIII.djvu/338

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Jusqu'à cet instant-là, gardons superbement,
Ô peuple, la fureur de notre abaissement, -
Et que tout l'alimente et que tout l'exaspère.
Étant petit, j'ai vu quelqu'un de grand, mon père.
Je m'en souviens; c'était un soldat, rien de plus;
Mais il avait mêlé son âme aux fiers reflux,
Aux revanches, aux cris de guerre, aux nobles fêtes,
Et l'éclair de son sabre était dans nos tempêtes.
Oh! je ne-vous veux pas dissimuler l'ennui,
A vous; fameux hier, d'êtré obscurs aujourd'hui,
O nos soldats, lutteurs infortunés, phalange
Qu'illumina jadis la gloire sans mélange,
L'étranger à cette heure, hélas! héros trahis,
Marche-sur votre histoire et sur votre pays.;
Oui, vous avez laissé ces reîtres aux mains viles
Voler nos-champs,-voler nos murs, voler nos villes,
Et compléter leur gloire avec nos sacs d'écus;
Oui, vous fûtes captifs, oui, vous êtes vaincus;
Vous êtes dans le puits des chutes insondables;
Mais c'est votre destin d'en sortir formidables,
Mais vous vous dresserez, mais vous vous lèverez,
Mais vous serez ainsi que la faulx dans les prés;
L'hercule celte en vous, la hache sur l'épaule,
Revivra, vous rendrez sa frontière à la Gaule,
Vous foulerez aux pieds Fritz, Guillaume, Attila,
Schinderhanne et Bismarck, et j'attends ce jour-là!

Oui, les hommes d'Eylau vous diront: Camarades!

Et jusque-là, soyez pensifs loin des parades,
Loin des vaines rumeurs, loin des faux cliquetis,
Et regardez grandir nos fils encor petits.