Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIV.djvu/118

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Aux mandarins dormant sur les coussins des jonques ;
Dupins, Crispins, Scapins, Chaix d’Est-Anges quelconques,
C’est ainsi que ces gens qui disent : nous jugeons !
Durs comme le granit, souples comme les joncs,
Valetaille à genoux sous le plat de l’épée,
Ont fait rouvrir les yeux à la tête coupée !

Elle était dans le fond de la tombe, elle avait
Les pierres de la fosse infâme pour chevet ;
Autour d’elle gisaient, muets sous l’herbe haute,
Tous les sinistres morts qui dorment côte à côte
Dans ce fatal Clamart dont les cercueils sont courts " ;
Sans haleine, sans voix, morte, attendant toujours,
Elle était là, pensive à cause des ténèbres ;
Ses yeux fermés, le sang collant leurs cils funèbres,
Semblaient faire un refus farouche au firmament,
Et vouloir regarder l’ombre éternellement.
L’âme espère au tombeau n’être point poursuivie.
Mais un bruit est venu du côté de la vie,
Et la tête coupée a remué, son œil.
Plein d’un feu sombre, a fait le jour dans le cercueil,
Et morne, a regardé les hommes, chose affreuse !

Et la nature, mère énorme et douloureuse,
Hélas ! s’est efforcée alors de l’apaiser ;
Les moineaux ont couru près d’elle se poser,
Et la mouche, apportant la pitié de l’atome ;
La rosée a lavé sa pâleur ; divin baume,
La fleur l’a-parfumée, et.l’herbe.qui verdit
L’a doucement baisée,. et les corbeaux ont dit
— N’écoute pas le noir croassement des juges !

Et dans ce moment-là ; cyprès, tombeaux, refuges,
Ossements, ossements, vous l’avez entendu.
Et toi, ciel étoilé, gouffre où rien n’est perdu,