Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Roman, tome I.djvu/251

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vous venger de Schumacker ; vous aviserez ensuite au moyen de vous venger de Han lui-même. Les révoltés marcheront aujourd’hui tout le jour et feront halte ce soir, pour passer la nuit dans le défilé du Pilier-Noir, à deux milles de Skongen.

— Comment ! vous laisseriez pénétrer si près de Skongen un rassemblement aussi considérable ? — Musdœmon !…

— Un soupçon, noble comte ! Que votre grâce daigne envoyer, à l’instant même, un messager au colonel Vœthaün, dont le régiment doit être en ce moment à Skongen ; informez-le que toutes les forces des insurgés seront campées cette nuit sans défiance dans le défilé du Pilier-Noir, qui semble avoir été créé exprès pour les embuscades.

— Je vous comprends ; mais pourquoi, mon cher, avoir tout disposé de façon que les rebelles soient si nombreux ?

— Plus l’insurrection sera formidable, seigneur, plus le crime de Schumacker et votre mérite seront grands. D’ailleurs il importe qu’elle soit entièrement éteinte d’un seul coup.

— Bien ! mais pourquoi le lieu de la halte est-il si voisin de Skongen ?

— Parce que, dans toutes les montagnes, c’est le seul où la défense soit impossible. Il ne sortira de là que ceux qui sont désignés pour figurer devant le tribunal.

— À merveille ! — Quelque chose, Musdœmon, me dit de terminer promptement cette affaire. Si tout est rassurant de ce côté, tout est inquiétant de l’autre. Vous savez que nous avons fait faire à Copenhague des recherches secrètes sur les papiers qui pouvaient être tombés au pouvoir de ce Dispolsen ?

— Eh bien, seigneur ?

— Eh bien, je viens d’apprendre à l’instant que cet intrigant avait eu des rapports mystérieux avec ce maudit astrologue Cumbysulsum.

— Qui est mort dernièrement ?

— Oui ; et que le vieux sorcier avait en mourant remis à l’agent de Schumacker des papiers.

— Damnation ! il avait des lettres de moi, un exposé de notre plan !

— De votre plan, Musdœmon !

— Mille pardons, noble comte ! Mais aussi pourquoi votre grâce avait-elle été se livrer à ce charlatan de Cumbysulsum ? le vieux traître !

— Écoutez, Musdœmon, je ne suis pas comme vous un être sans croyance et sans foi. — Ce n’est pas sans de justes raisons, mon cher, que j’ai toujours eu confiance dans la science magique du vieux Cumbysulsum.

— Que votre grâce n’a-t-elle eu autant de défiance de sa fidélité que de confiance en sa science ! Au surplus, ne nous alarmons pas, mon noble