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LES MISÉRABLES. — MARIUS.

comprenait mieux ainsi. Lire haut, c’est s’affirmer à soi-même sa lecture. Il y a des gens qui lisent très haut et qui ont l’air de se donner leur parole d’honneur de ce qu’ils lisent.

La mère Plutarque lisait avec cette énergie-là le roman qu’elle tenait à la main. M. Mabeuf entendait sans écouter.

Tout en lisant, la mère Plutarque arriva à cette phrase. Il était question d’un officier de dragons et d’une belle :

« … La belle bouda, et le dragon… »

Ici elle s’interrompit pour essuyer ses lunettes.

— Bouddha et le Dragon, reprit à demi-voix M. Mabeuf. Oui, c’est vrai, il y avait un dragon qui, du fond de sa caverne, jetait des flammes par la gueule et brûlait le ciel. Plusieurs étoiles avaient déjà été incendiée ? par ce monstre qui, en outre, avait des griffes de tigre. Bouddha alla dans son antre et réussit à convertir le dragon. C’est un bon livre que vous lisez là, mère Plutarque. Il n’y a pas de plus belle légende.

Et M. Mabeuf tomba dans une rêverie délicieuse.