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LE MANUSCRIT DES MISÉRABLES.

Wellington avait été battu, c’eût été lui qui aurait perdu le temps. On lui aurait reproché son bal de la duchesse de Richmond, ses soldats laissés sous la pluie toute la nuit quand il était maître de tant de villages dont il pouvait tirer parti pour abriter ses troupes, l’imprudence d’adosser son armée à un bois qui en cas de défaite devait désagréger son armée, heurter chaque homme à un arbre, dissoudre les bataillons, et changer la retraite en désastre, les étangs de Groenendael et de Boisfort derrière lui, obstacles infranchissables à son artillerie en fuite, ses communications négligées avec Blücher, etc. — Vainqueur, tout cela fut habile.




Tout en visitant les divers points où la lutte s’était engagée, Victor Hugo, son carnet à la main, écrit, debout, où il se trouve, d’abord sur la porte de la ferme d’Hougomont dont il prend deux croquis, l’un de la porte méridionale, l’autre de la porte septentrionale ; ensuite sur l’autel de la chapelle du château, dont il décrit minutieusement l’intérieur ; au milieu d’une feuille il trace un plan sommaire prêt à être consulté à tout moment : là se trouvaient Napoléon et son guide Lacoste ; quelques lignes au coin opposé de la feuille assignent à Wellington sa place ; tout autour les divers points d’attaque sont indiqués : Hougomont, Ohain, la Belle-Alliance, Plancenoit.

À part les notes relatives au livre même, il arrive souvent qu’un village, un hameau suggère à Victor Hugo une remarque ou donne matière à un croquis ; après avoir visité l’église de Nivelles, le poète écrit :


Il y a dans l’église de Nivelles un bas-relief remarquable. La Mort est assise sur un tombeau. L’Amour vient à elle. La Mort se couvre les yeux de sa main. C’est beau, cet éblouissement de la nuit par la lumière.


Plus loin, nous voyons le pilori de Braine-le-Château, si finement esquissé qu’on peut à peine le fixer.

On verra, page 621, le joli dessin de l’abbaye de Villers.

Au-dessous du moulin de Mont-Saint-Jean, crayonné sur place, on lit ces vers écrits à l’encre :

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Ô despote orageux, que fut ta destinée !
Tu fus César, tu fus grand comme Salmonée,