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NOTES DE L’ÉDITEUR.

pour les Misérables. Cela me parait d’une très grande importance. Mme Sand a ôté toute valeur à son œuvre complète en la scindant.


Le conseil d’Hetzel était sage. Victor Hugo écrit au dos de la lettre :


Lettre de Hetzel à consulter pour le traité des Misérables. — Imposer aux acquéreurs l’obligation de faire des éditions d’accord avec tous les formats de toutes les œuvres complètes et particulièrement avec l’in-octavo. — Prévoir et discuter le cas d’un journal. Dans tous les cas le journal devrait être accepté par moi.


Il s’agissait de la publication des Misérables en feuilleton.

Les négociations se poursuivaient. Lacroix désirait ardemment être l’éditeur de Victor Hugo, mais il avait lu tout d’abord que les Misérables étaient en six volumes. Victor Hugo en annonçait maintenant huit et même neuf dans sa lettre du 5 septembre à Charles Hugo. Il y en aurait peut-être davantage. Achète-t-on un roman en neuf volumes ? C’est un gros prix pour l’éditeur et un gros prix pour l’acheteur. Lacroix pouvait s’en préoccuper à bon droit. Mais Victor Hugo le rassure par une lettre datée du 20 septembre :


Ce que vous me dites des romans longs ne me paraît point résulter des faits connus en librairie. Peu de succès sont comparables au succès de Gil Blas, de Don Quichotte et de Clarisse Harlowe : trois romans longs… Le prix indiqué par moi est d’environ 30,000 francs par volume pour une exploitation de huit ans[1]. C’est un prix fort modéré. Une seule édition de Notre-Dame de Paris (la première édition illustrée faite par Renduel, 1836) a été affermée par moi 60,000 francs. Les 12,000 francs donnés par le traité Gosselin-Renduel pour deux volumes (3,150 exemplaires avec exploitation maximum d’une année) feraient pour huit années 96,000 francs, et appliqués à huit volumes, pour le même laps de temps, 384,000 francs : prix fort supérieur à celui que je demande.

Si M. Lacroix désire venir, je serai charmé de le voir. On fait plus de besogne, en effet, dans une heure de causerie que dans vingt lettres. Il verra le manuscrit. Le voyage n’est rien. Quelque chose comme 200 francs aller et retour. Il faut s’embarquer de façon à être à Southampton un lundi, mercredi ou vendredi. On est le lendemain à Guernesey.


À une discussion de chiffres aussi serrée Lacroix n’avait rien à objecter ; il ne pouvait qu’accepter une aussi gracieuse invitation ; il se rendit donc à Guernesey ; c’était la seule manière d’obtenir et de conclure rapidement le traité.


LE TRAITÉ DES MISÉRABLES.

On lit dans les carnets de Victor Hugo :


3 octobre : M. Lacroix est arrivé de Bruxelles m’apportant une proposition pour les Misérables (240,000 francs 12 années).

4 octobre : J’ai vendu aujourd’hui les Misérables à MM. Lacroix, Verboeckhoven et Cie de Bruxelles pour 12 années moyennant 240,000 francs argent et 60,000 francs éventuels. Ils acceptent le traité Gosselin-Renduel. Le contrat a été signé ce soir.


En effet, le traité fut rédige séance tenante et les payements réglés ainsi qu’il suit :


1° 125,000 francs à la remise des manuscrits qui s’effectuera du 15 novembre au 15 décembre.

2° 55,000 francs deux mois jour pour jour après la publication de la première partie du roman.

3° Les 60,000 francs restant deux mois après la seconde partie.


Victor Hugo s’était souvenu de la recommandation d’Hetzel et il avait stipulé que « MM. Lacroix, Verboeckhoven et Cie s’obligeaient à compléter les éditions existantes des œuvres complètes

  1. Sans le droit de traduction.