Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome I.djvu/290

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CROMWELL.
Bien !
Il prend le sac et le dépose sur la table près de lui.

MANASSÉ, à part.
À cet œil de lynx rien ne peut échapper
Les cavaliers au moins sont aisés à tromper ;

Je leur prends leur navire et leur ouvre ma banque.
Ainsi, grâce à mes soins, leur ressource leur manque ;
Et puis au denier douze, ainsi qu’il est réglé,
Je leur revends l’argent que je leur ai volé ;
Car voler des chrétiens, c’est chose méritoire.

CROMWELL.
Que sais-tu de nouveau, face de purgatoire ?
MANASSÉ.
Rien : — sinon que le bruit s’est dans Londre épandu

Qu’un astrologue à Douvre avait été pendu.

CROMWELL.
C’est bien fait. — Mais toi-même, es-tu pas astrologue ?
MANASSÉ, après un moment d’hésitation.
Point de faux témoignage, a dit le décalogue.

Oui, je comprends ce livre, obscur pour le démon,
Qu’épelait Zoroastre, où lisait Salomon.
Oui, je sais lire au ciel vos bonheurs, vos désastres.

CROMWELL, à part, l’œil fixé sur le juif.
Sort bizarre ! épier les hommes et les astres !

Astrologue là-haut, ici-bas espion !

MANASSÉ, s’approchant avec vivacité d’une fenêtre ouverte au fond de la salle.et à travers laquelle on entrevoit un ciel étoilé.
Tenez ! précisément, là, près du Scorpion, —

En ce moment, seigneur, je vois... —

CROMWELL.
Quoi ?