Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome V.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
THÉÂTRE EN LIBERTÉ.

Eh bien alors, j’ai faim !

Eh bien alors, j’ai faim ! Il s’assied sur une pierre.

Eh bien alors, j’ai faim ! Qu’on me dresse une table
Copieuse, insensée, aimable, délectable.
Je veux manger. Manger énormément.

LE ROI.

Je veux manger. Manger énormément. Bravo !
Mangeons. À la bonne heure !

AÏROLO.

Mangeons. À la bonne heure ! Ayez du bœuf, du veau,
Du mouton, du chapon, tout l’idéal !

LE ROI.

Du mouton, du chapon, tout l’idéal ! J’abonde !

AÏROLO, aux soldats, aux valets et aux courtisans
au fond du théâtre.

Servez !

Le roi leur fait signe d’obéir.
AÏROLO.

Servez ! Que le gibier, peuplade vagabonde,
S’abatte tout rôti dans des assiettes d’or !
Donnez tous vos oiseaux, de la grive au condor,
De quoi faire au seigneur Polyphème une tourte,
Bois où j’ai vu courir Diane en jupe courte !
Que les monstres exquis nageant au gouffre amer
Viennent, et pour la sauce abandonnent la mer !
Qu’un vin pur fasse fête aux poulardes friandes !
Et que de cet amas de fricots et de viandes,
Du chaudron qui les bout, du fourneau qui les cuit,
Il sorte une fumée assez épaisse, ô nuit,
Pour aller dans le ciel rougir les yeux des astres !

Au roi.

Vous n’épargnerez point les doublons et les piastres
Pour m’offrir dès ce soir un festin réussi.