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DEPUIS L’EXIL. — 1885.

grand lutteur pour la liberté de la forme et de la pensée ; Leconte de l’Isle, voix autorisée, salue au nom des poëtes « le plus grand des poëtes, celui dont la voix sublime ne se taira plus parmi les hommes ».

Louis Ulbach, au nom de l’Association littéraire internationale, dit ce qu’est, à l’étranger, Victor Hugo, « l’écrivain français le plus admiré hors de France » ; Philippe Jourde, pour la presse parisienne, revendique en Victor Hugo le journaliste, le rédacteur du Conservateur littéraire, le conducteur de l’Événement et du Rappel ; Madier de Montjau, au nom des proscrits de 1851, rappelle en paroles émues comment Victor Hugo fut la consolation et la lumière de ses compagnons d’exil ; le statuaire Guillaume, au nom des artistes français, glorifie, dans le poète des Orientales, « l’artiste le plus grand du siècle, le maître souverain de l’idée et de la forme ». M. Delcambre, au nom de l’Association des étudiants de Paris, dit comment Victor Hugo a été « pour tous les jeunes gens, l’initiateur et le bon guide ». Got, le grand comédien, remercie Victor Hugo, au nom de son théâtre, des grands drames dont il a honoré et enrichi la Comédie-Française.

C’est le tour des étrangers. M. Tullo Massaroni et M. Raqueni viennent associer au deuil de la France le deuil de l’Italie ; M. Boland, au nom du peuple de Guernesey, vient dire quelle trace lumineuse et douce laissera dans l’île la grande mémoire de l’exilé ; M. Lemat, un des défenseurs de Charlestown, apporte le témoignage de « la douloureuse émotion ressentie d’un bout à l’autre des États-Unis à la nouvelle de la mort de Victor Hugo, l’homme considérable dont la perte a rempli d’unanimes regrets l’âme du monde civilisé. » La race noire, dans la personne de M. Édouard, représentant de la République d’Haïti, « salue Victor Hugo et la grande nation française », et jette ce cri : « Jamais Athènes et Rome n’ont été le théâtre d’une si imposante solennité ! Paris dépasse aujourd’hui Rome et Athènes ! »

Pendant tous ces discours, l’immense cortège n’a pas cessé de se dérouler devant le Panthéon.

Chaque groupe, en passant, laisse sur les marches sa couronne ou son trophée de fleurs. Les degrés du vaste édifice en sont bientôt couverts du haut en bas, et jusque sur les faces latérales.

Paris viendra en pèlerinage, pendant bien des jours suivants, s’émerveiller devant cet amoncellement de fleurs.

Il est six heures et demie quand le dernier groupe a passé.