Page:Hugo - L'Art d'être grand-père, 1877.djvu/195

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Je suis, pour le saisir, monté sur une table.
Alors, terrifié, vaincu, jetant des cris,
Il est allé tomber dans un coin ; je l’ai pris.
Contre le monstre immense, hélas, que peut l’atome ?
À quoi bon résister quand l’énorme fantôme
Vous tient, captif hagard, fragile et désarmé ?
Il était dans mes doigts inerte, l’œil fermé,
Le bec ouvert, laissant pendre son cou débile,
L’aile morte, muet, sans regard, immobile,
Et je sentais bondir son petit cœur tremblant.

Avril est de l’aurore un frère ressemblant ;
Il est éblouissant ainsi qu’elle est vermeille.
Il a l’air de quelqu’un qui rit et qui s’éveille.
Or, nous sommes au mois d’avril, et mon gazon,
Mon jardin, les jardins d’à côté, l’horizon,
Tout, du ciel à la terre, est plein de cette joie
Qui dans la fleur embaume et dans l’astre flamboie :
Les ajoncs sont en fête, et dorent les ravins
Où les abeilles font des murmures divins ;
Penché sur les cressons, le myosotis goûte
À la source, tombant dans les fleurs goutte à goutte ;
Le brin d’herbe est heureux ; l’âcre hiver se dissout ;
La nature parait contente d’avoir tout,
Parfums, chansons, rayons, et d’être hospitalière.
L’espace aime.